La mégère institutrice #5

ACTE II, SCENE 1

Jacqueline, la maîtresse, est dans sa classe, elle range des cahiers, nettoie son tableau, tout en se parlant à mi-voix...

JACQUELINE

Bon alors, les cahiers violets sont tous là ? 1,2,3,... 26,27,28. Tien, il m'en manque un ! Ah oui c'est vrai, c'est celui de Sophie, je l'ai mis de côté pour l'entretien de tout à l'heure. Vide le cahier ! Au bout de deux mois, elle n'a rien écrit dedans cette petite paresseuse. Et sa mère qui n'a pas été capable de lui acheter à temps. Faut dire qu'avec tous ses gamins, elle ne peut pas. Madame prétend faire elle-même la classe à la maison ! Pffff... Mais pour qui se prend elle donc. C'est incapable d'aller travailler, ça fabrique des mômes à un rythme de lapine et ça s'imporvise institutrice. N'importe quoi. Quelles connaissances et quelle expérience a-t-elle pour cela ? Et Sophie ? Regardez moi cette gamine ! Incapable de suivre les autres. Toujours perdue ! Comme si j'avais le temps de m'en occuper.  Avec 28 élèves et deux niveaux. Ils m'épuisent ces enfants. Je suis tout le temps en train de faire la discipline, ils sont incapables de travailler, je suis obligée de crier. Non, vraiment ça m'épuise ! Et cette Sophie !  Une petite mijaurée, trop polie pour être franche ! Une sainte nitouche ! Jamais une vague, et elle ne demande rien...... A cet âge ce n'est pas possible, cela cache quelque chose ! Dire qu'il va falloir que je voie sa mère. Oh mais ça ne va pas se passer comme ça ! Il va falloir qu'elle comprenne. Je suis sûre qu'elle ne fiche rien à la maison. La mère n'a pas le temps de s'en occuper, tu penses ! Et à côté, de ça si sûre d'elle quand elle me l'a amenée... Il va falloir que je compose, que je trouve quelque chose de positif. C'est incroyable ces parents, moins ça s'occupe de ses enfants, moins ça supporte qu'on leur dise que leur progéniture n'est pas parfaite ! Enfin, Sophie lit très bien. Avec ça je devrais pouvoir acheter ma tranquillité. Non, parce que ce cahier violet vide... et cette pochette ! Quel désordre ! On y trouve de tout ! Faut vraiment mettre cette enfant au pas ! Comme si j'avais que ça à faire ! Ca m'épuise tout ça, je commence déjà à  avoir mal à la tête...Quelle idée aussi de faire soi même la classe ! Jamais elle ne passera en 6è comme ça. Je ne la laisserai pas faire. Si elle est perdue maintenant, elle le sera encore plus au collège. Ca lui apprendra aussi à cette femme. Il va falloir se battre, mais je ne me laisserai pas faire, non, même si je suis épuisée, je me ferai respecter, sinon, je mettrai fin à l'entretien...

La lumière de la classe baisse progressivement, Jacqueline marmonne toujours.

Comments

[Flo]

Tant que Jeanne n'a pas vu Jacqueline, elle ne peut que s'interroger effectivement mais cette dernière n'a pas l'air de donner une bonne image de l'Education nationale non plus et c'est Sophie qui en pâtit et par ricochet, ses parents, et sa maman surtout. Mesdames, mères de famille nombreuse, je suis sûre que vous avez déjà eu ce genre de réflexions navrantes à propos justement de vos nombreux enfants, Jeanne a besoin d'extérioriser ce qu'elle ressent et c'est bien normal. Nous attendrons donc bien sagement la suite :)

[Modestement]

La suite, la suite !

[Nathalie]

j'espère que la maman n'a pas entendue ce que disait cette maîtresse !

serait-elle débordée comme bcp d'autres de ces collègues ?

[Alphonsine]

@ Ségolène,

J'ai 6 enfants, et j'ai fait l'école à la maison. Pas toujours, pas toujours pour tous. Je les ai également scolarisés, et si j'ai eu des maîtresses merveilleuses, j'ai eu le pire aussi... ou plutôt mes enfants, et certains en ont bien souffert. L'un a même été rejeté parce qu'il était handicapé, et c'était une école bien catholique qui m'a refusé l'inscription en CP.



Je suis certaine que Jeanne a pardonné, mais en attendant, il lui appartient de sauver son enfant, et je pèse mes mots. Certains sont dans de telles souffrances qu'ils ne peuvent se reconstruire qu'en voyant de quelle façon leurs parents les soutiennent et les aident.



Un blog aide à dédramatiser des situations, y porter un peu d'humour, parfois de dérision, et peut-être même une touche de causticité permet certainement à Jeanne de se libérer.



Bravo Jeanne pour votre énergie, votre courage, votre ténacité pour aider Sophie à trouver sa place dans la société !

[Ségolène]

Paix, paix, paix... à Jeanne et Jacqueline! Et si Jeanne chaussait les lunettes du Bon Dieu? Elle ne verrait peut-être pas que des défauts chez cette institutrice... Si ça tombe, Jacqueline va même être très bienveillante... Et si ce n'était pas le cas, je prie pour que vous ayez la force de lui pardonner... Bon et saint carême!